Algérie: La justice ordonne la libération de quatre figures de la contestation
La justice algérienne a décidé jeudi de relâcher une figure emblématique du mouvement populaire antirégime, Karim Tabbou, et trois autres militants connus, ce qui apparaît comme un geste d’apaisement à la veille de l’anniversaire de l’Indépendance.
En quelques heures, Karim Tabbou, Amira Bouraoui, Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche ont bénéficié d’une remise en liberté provisoire, après plusieurs mois de répression menée par le pouvoir pour tenter d’empêcher un retour du mouvement de contestation ou « Hirak », suspendu en mars en raison de la pandémie de Covid-19.
« La demande de liberté provisoire a été acceptée. Tabbou va être libéré jeudi », a déclaré à l’AFP l’un des avocats de l’opposant, Abdelghani Badi. Il devrait retrouver la liberté dans l’après-midi.
Emprisonné depuis le 26 septembre 2019, Karim Tabbou avait été condamné en appel le 24 mars à un an de prison ferme pour « atteinte à l’intégrité du territoire national ».
Pendant le procès, le juge avait refusé sa demande de ne pas comparaître sans la présence de ses avocats. Et lors d’une des audiences Karim Tabbou avait été pris d’un malaise, victime d’une poussée de tension artérielle, selon ses avocats.
L’opposant est également poursuivi pour « atteinte au moral de l’armée » dans le cadre d’une autre affaire, dont le procès a été reporté au 14 septembre.
Plusieurs ONG se sont félicitées de cette libération, à quelques jours du 58e anniversaire de l’Indépendance, célébré dimanche.
« Algérie, Karim Tabbou enfin libéré. Grand soulagement en attendant les autres », a twitté Saïd Salhi, le vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’Homme.
« Bonne Nouvelle: Liberté provisoire pour #KarimTabbou », a abondé Amnesty International, qui avait lancé une campagne internationale en faveur de sa libération.
« Karim Tabbou relâché par ses ravisseurs. Il reste tous les autres. Il restera, ensuite, à libérer la justice », a néanmoins tempéré Abdellah Benadouda, fondateur de Radio Corona Internationale, une station pro-« Hirak » basée aux Etats-Unis.
Lors d’un procès en appel près d’Alger, Amira Bouraoui, opposante farouche au président déchu Abdelaziz Bouteflika, a bénéficié elle aussi d’une remise en liberté provisoire. Elle doit quitter la prison dans l’après-midi, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).
« Liberté provisoire pour Amira Bouraoui avec report de son procès en appel à l’audience du 24 septembre 2020 », a indiqué l’avocate Fetta Sadat sur sa page Facebook.
Mme Bouraoui avait été condamnée le 21 juin à un an de prison ferme notamment pour « offense à l’islam » et « offense » au président de la République.
Deux autres figures du « Hirak » emprisonnées, Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche, vont également sortir de prison jeudi.
Amnesty a réclamé « la libération immédiate et sans condition de tous les détenus d’opinion en Algérie ».
Selon le CNLD, près de 70 prisonniers d’opinion sont actuellement derrière les barreaux, la plupart pour des publications sur Facebook.
Karim Tabbou est l’un des visages et l’une des voix les plus connues du « Hirak ».
Chef d’un petit parti d’opposition non enregistré, l’Union démocratique et sociale (UDS), son portrait était régulièrement brandi lors des manifestations hebdomadaires suspendues depuis mars en raison de la pandémie de Covid-19.
« On est content pour Tabbou et sa famille (…). On attend la libération de tous les détenus, ça serait un bon geste d’apaisement », a commenté l’avocat Mustapha Bouchachi.
(AFP)