Ethiopie: Le parlement réduit drastiquement les fonds alloués à la région rebelle du Tigré
La Chambre haute éthiopienne a annoncé mercredi avoir voté une réduction drastique des fonds fédéraux alloués à la région du Tigré, en conflit avec le pouvoir central du Premier ministre Abiy Ahmed, une décision qualifiée de « totalement inacceptable et dangereuse » par un haut responsable tigréen.
Cette décision creuse un peu plus le fossé entre Addis Abeba et l’Etat régional du Tigré, fief du Parti de libération du Peuple du Tigré (TPLF), qui a dirigé de façon hégémonique la coalition au pouvoir en Ethiopie entre 1991 et l’arrivée au pouvoir de M. Abiy, un Oromo, en 2018.
Elle intervient en représailles à l’organisation, en septembre, d’élections régionales au Tigré par ses dirigeants, malgré le report de tous les scrutins ordonné par Addis Abeba en raison de l’épidémie de Covid-19.
Le Conseil de la Fédération, chambre haute du Parlement, compétente en matière de répartition du budget fédéral aux Etats régionaux, a déclaré le scrutin au Tigré « nul et non avenu » et réclamé mardi que le gouvernement fédéral coupe tout lien avec l’exécutif tigréen.
« Le Conseil de la Fédération a déclaré que l’Assemblée régionale du Tigré, constituée illégalement, n’avais pas de fondement légal et ne recevrait donc pas de soutien budgétaire », a déclaré mercredi à la télévision nationale le président de la Chambre haute, Adem Farah.
Le Tigré devait se voir allouer 10,4 milliards de birs (environ 240 millions d’euros) de subsides du budget fédéral pour l’année fiscale en cours et il n’était pas clair dans l’immédiat à quel point le vote de la Chambre haute allait amputer cette somme.
De leur côté, les dirigeants tigréens, qui affirment être depuis l’arrivée de M. Abiy injustement visés par des poursuites anticorruption, écartés des postes de responsabilité et rendus responsables de tous les maux du pays, ont rejeté la prolongation, faute de scrutins, des mandats électifs en Ethiopie – censés expirer cette semaine -, au premier rang desquels celui de M. Abiy.
La coupe dans les fonds fédéraux destinés au Tigré est « totalement inacceptable et dangereuse », a dénoncé Wondimu Asamnew, chef du Bureau de liaison du Tigré.
« Vous ne faites pas ça à un membre d’une République fédérale, à moins de vouloir, en pratique, déclarer que le Tigré est un Etat étranger indépendant », a affirmé M. Wondimu à l’AFP.
« Les conséquences sont très, très graves », a-t-il averti, précisant qu’une réponse formelle du Tigré interviendrait « dans un délai très court ».