Les Egyptiens se rendent aux urnes ce samedi pour des élections législatives
Quelque 63 millions d’électeurs sont appelés à désigner 568 des 596 députés au cours de deux phases de scrutin: 14 gouvernorats voteront samedi et dimanche, et les 13 autres gouvernorats du pays se prononceront les 7 et 8 novembre. Un deuxième tour est prévu pour chacune des deux phases. Les résultats définitifs seront annoncés le 14 décembre.
La chambre basse actuelle, la première élue sous la présidence de l’ex-chef de l’armée en 2015, est déjà dominée à une écrasante majorité par des partisans du président égyptien. L’opposition représentée par le « bloc des 25/30 » y est très minoritaire.
Après cinq années de législature, le travail des parlementaires est « décevant », estiment des observateurs de la vie politique égyptienne.
« Le Parlement est devenu un appareil lié à l’autorité exécutive, sans réel pouvoir législatif », a déclaré à l’AFP Hassan Nafaa, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire.
« Il n’a presque jamais remis en cause les politiques du gouvernement ou rempli les fonctions qui sont habituellement celles des parlements », a-t-il ajouté.
Depuis plusieurs semaines, des posters géants des candidats –plus de 4.000 au total– ont été affichés dans les villes égyptiennes, et les candidats font campagne en ligne à coup de vidéos.
De nombreux candidats sortants se représentent lors de ce scrutin auquel participent des dizaines de partis sans influence réelle sur le terrain.
Une coalition progouvernementale conduite par le parti Mostakbal Watan (« avenir de la nation », NDLR) rassemble le plus grand nombre de candidats.
Ce parti, qui comprend des hommes d’affaires influents et des personnalités publiques, a accru son influence politique depuis 2014, et son chef, Abdelwahab Abdelrazek, a été nommé cette semaine à la tête du Sénat.
Le scrutin d’octobre sera le deuxième tenu pendant l’épidémie de nouveau coronavirus. L’Egypte a enregistré depuis le début de la pandémie plus de 105.000 cas sur son sol, dont près de 6.200 décès.
En août, les Egyptiens avaient voté pour pourvoir une partie des 300 sièges de la chambre haute, une centaine de sénateurs étant désignés par M. Sissi. Ce dernier scrutin avait été marqué par un taux de participation très faible (14,23%).
Si l’opposition était faible sous la présidence de Hosni Moubarak — chassé du pouvoir en 2011 après un règne de près de 30 ans, au début du Printemps arabe — elle était alors davantage représentée au Parlement.
En 2005, la confrérie des Frères musulmans, officiellement interdite, avait fait une percée politique aux législatives en remportant un siège sur cinq, en soutenant des candidats qui se présentaient comme « indépendants ».
Cette opposition a été écrasée dans le sang après la chute du président islamiste Mohamed Morsi en 2013.
Le rétablissement du Sénat, aboli après la destitution de M. Morsi, fait partie d’une série d’amendements approuvés par référendum en 2019.
Ces amendements comprennent également la possibilité pour M. Sissi de se maintenir au pouvoir jusqu’en 2030. Ils renforcent son contrôle sur le pouvoir judiciaire et permettent à l’armée d’étendre davantage son influence sur l’économie.
Sur les réseaux sociaux, les élections sénatoriales avaient été vivement critiquées, qualifiées d' »inutiles » ou de « farce ».
« Le retour du Sénat n’était pas nécessaire, et le Parlement sert simplement de façade », a déclaré à l’AFP Saeed Sadiq, professeur de sociologie politique à l’Université du Nil, à Gizeh près du Caire.
Selon lui, les législatives devraient également être caractérisées par un faible taux de participation, essentiellement dû au désintérêt des électeurs.
Sous la présidence Sissi, élu en 2014 puis réélu en 2018, l’Egypte a lancé une vaste campagne contre la mouvance islamiste, dont les Frères musulmans, mais aussi les militants de gauche, journalistes et blogueurs. Les manifestations sont interdites depuis et l’état d’urgence est en vigueur depuis 2017.