Les Sénégalais au rendez-vous samedi avec le Grand Magal de Touba
Les Sénégalais venus de toutes les régions du pays et même de l’étranger s’apprêtent à célébrer, comme à l’accoutumé, samedi prochain, le Grand Magal de Touba, dans le centre-ouest du pays, une des plus grandes fêtes religieuses et un rendez-vous annuel incontournable des membres de la confrérie des mourides, et ce malgré le contexte de la pandémie Covid-19 qui frappe le monde.
Célébré depuis 1928 au Sénégal, le Magal de Touba, une ville située à quelque 194 km à l’est de la capitale Dakar, draine chaque année des millions de personnes pour commémorer le départ en exil du fondateur de la confrérie mouride, Cheikh Ahmadou Bamba.
Lors de ce rassemblement religieux, la confrérie célèbre en prières dans la ville sainte où il repose son fondateur et guide spirituel, à la date anniversaire (du calendrier musulman) où l’administration coloniale française l’avait contraint à l’exil au Gabon, en 1895. Le chef religieux, qui n’a jamais porté les armes, avait été contraint par les autorités coloniales françaises à l’exil au Gabon (1895-1902) puis en Mauritanie (1903-1907), avant d’être placé en résidence surveillée dans le nord du Sénégal.
Qu’il pleuve ou qu’il vente, des milliers de disciples de la Tariqa Mouridia affluent sur cette ville, soit à bord de voitures, de camions, de taxis collectifs ou dans des cars rapides, venant des quarte coins du Sénégal, bravant les gigantesques embouteillages qui surviennent en ces jours, pour fêter comme il se doit, dans un climat de piété, le départ du fondateur de la confrérie, Cheikh Ahmadou Bamba Mbacké en exil au Gabon, où il demeura sept ans.
Comme à l’accoutumée, les fidèles, qui viennent aussi des pays voisins, de la Guinée et de la Mauritanie en particulier, et d’autres pays plus lointains, envahissent en ce jour de fête, en rangs serrés la grande mosquée de Touba et les alentours des différents mausolées de cette ville, considérée comme sainte. Touba fut fondée dans la forêt de Mbaffar en 1888 par le cheikh Ahmadou Bamba Khadimou Rassoul, le fondateur du mouridisme.
Les fidèles, après qu’ils récitent en petits groupes des versets du Saint Coran et des « khassaïdes », se rendaient dans un climat de recueillement, en de longues files dans les mausolées érigés en l’honneur du fondateur du mouridisme et de ses fils et successeurs, considérés comme des saints dans le pays.
Covid-19 l’oblige, les autorités sénégalaises, à leur tête le Chef de l’Etat Macky Sall, ne lésinent pas sur les moyens et ont annoncé cette semaine la prise d’une série de mesures et le déploiement de grands moyens et logistiques pour garantir la réussite de cet important événement religieux et afin qu’il se déroule dans les conditions minimales d’hygiène et de sécurité surtout en cette conjoncture de pandémie qui secoue le monde.
Le ministre de la Santé et de l’Action sociale Abdoulaye Diouf Sarr, assure, pour sa part, que les dispositions nécessaires ont été déjà prises par ses services pour une bonne couverture sanitaire de ce Grand Magal de Touba, et lors duquel 3500 agents vont être déployés.
« Globalement, nous sommes satisfaits et nous pouvons dire que le Magal va se faire dans les meilleures conditions parce que toutes les dispositions au plan sanitaire sont en place », a-t-il dit mardi dernier au terme d’une visite effectuée à Touba dans le cadre des préparatifs de cet événement d’envergure.
M. Diouf Sarr a fait savoir que son département va renforcer aussi les ressources humaines affectées au dispositif sanitaire retenu, avec le déploiement de 3500 agents de santé, notant que la Pharmacie nationale d’approvisionnement (PNA), a elle aussi pris toutes les dispositions pour que les médicaments « ne soient pas une difficulté pour les structures et les postes de santé ».
Concernant le volet prévention, le service d’hygiène, dont les équipes ont été déjà déployées sur place à Touba, est en train de prendre des dispositions pour assurer ses interventions à l’occasion de ce Magal, a-t-il assuré. Il en sera de même pour la gestion des urgences médicales par le SAMU national, qui va ouvrir une unité à Touba, a indiqué le ministre.
Durant l’évènement Touba, 2ème agglomération après la capitale Dakar et fief de la confrérie musulmane des Mourides, occupe le devant de la scène au Sénégal, mais aussi dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, et dans d’autres confins, auprès des nombreux adeptes de la tariqa mouridia à travers le monde. Toutes les villes et les régions du Sénégal seront ainsi désertées et la majorité des commerces fermés en ce jour.
Les autorités religieuses et sanitaires de la cité exhortent, de leur côté, tous les pèlerins et fidèles de respecter les mesures barrières pour le Magal de Touba (rendre hommage en wolof), qui constitue aussi une occasion et un moment de grands échanges sur le plan économique.
Selon une étude de l’économiste sénégalais, Souleymane Astou Diagne, de l’université de Bambey à Diourbel, le Magal génère pas moins de 250 milliards de francs CFA par an de retombées pour l’économie formelle et informelle.
Tout au long de ce jour, les pèlerins assisteront à des récitations du Coran et des « khassaïdes », poèmes écrits par Cheikh Ahmadou Bamba, élèveront des prières dans la mosquée aux sept minarets et se recueilleront sur les tombeaux du fondateur du mouridisme et de ses fils et successeurs, considérés comme des saints. Les fidèles partageront, aussi, le traditionnel « berndel » (banquet), repas gargantuesque composé de boeufs, moutons, poulets, chameaux, poissons, riz, fruits et boissons fraîches, servi à volonté dans chaque foyer.
A l’approche de cet événement, tous les chemins mènent à Touba. Membres du gouvernement, chefs d’entreprises, commerçants et même une bonne partie de la diaspora sénégalaise convergeaient vers la cité religieuse, qui accueille en cette occasion également tous les marchands ambulants, surtout aux alentours de la grande mosquée de Touba.
Pays réputé pour sa tolérance religieuse, le Sénégal compte plus de 90% de musulmans, adhérant pour la plupart à l’islam soufi, représenté par différentes confréries, dont celle des mourides est l’une des principales.