Bonnes feuilles II. Sarkozy raconte sa rencontre tendue avec l’ex-président Algérien Bouteflika
Dans « Le Temps des tempêtes », paru fin juillet, l’ancien président français, Nicolas Sarkozy lève le voile sur le début de son quinquennat et ses premiers contacts avec les chefs d’Etats africains. Seconde escale, Alger.
Le second voyage en Afrique tout aussi complexe pour Nicolas Sarkozy Sarkozy devait le ramener en Algérie. Il ne s’agissait que d’une visite de travail de cinq heures, mais il redoutait cette prise de contact avec le président Bouteflika dont la susceptibilité est à fleur de peau en raison du passé commun entre la France et l’Algérie.
« Attendre l’automne aurait été compris comme un manque de respect envers des Algériens toujours très suspicieux s’agissant de leur indépendance… L’unité de mesure, c’était trois heures. Si une réunion durait moins, on pouvait considérer qu’elle avait été écourtée. Un détail me gênait. Il ne voulait pas converser en face à face », écrit-il.
En évoquant le sujet inévitable de la « la guerre de libération », Sakozy comme ses prédécesseurs, subi un déluge de reproches. Comme sakozy incarnait un changement de ton dans la politique française, ses nerfs finissent par lâcher : « Un moment, n’en pouvant plus, je m’écriai : « Mais sais-tu qu’au moment des accords d’Évian, j’avais à peine 7 ans ! Nous n’allons pas passer ces quelques heures à nous préoccuper de ce qui s’est déroulé entre nos deux pays il y a maintenant quarante-cinq ans ! De grâce, regardons l’avenir, et, mettons, au moins entre nous, ce passé de côté. »
« Pour lui, c’était limpide, j’aimais davantage le Maroc que l’Algérie. Je m’en défendis avec vigueur même si intérieurement, je me disais : « Au moins, quand je suis à Rabat, le roi ne me reproche pas le Protectorat ! », indique-t-il.
Malgré ce désagrément, sarkozy garde un immense respect pour Abdelaziz Bouteflika : « Quand je repense à lui aujourd’hui, j’ai la nostalgie d’un homme cultivé, gentil, inconditionnel de son pays. Curieux destin personnel. Il était très discret sur sa vie privée. Il aimait sa mère et vivait avec elle. Il était proche de son frère que je n’ai pas connu réellement, et qui dort aujourd’hui dans une prison d’Alger, et ce pour de nombreuses années. »
L’épineux dossier des Pieds-noirs
Après sa première visite d’État en Algérie, l’ancien président français voulais profiter de la Journée nationale d’hommage aux combattants morts pour la France en Afrique de Nord pour revenir sur les questions de la colonisation, des rapports toujours si sensibles avec l’Algérie et de la dette contractée par la République à l’endroit des harkis en particulier, et des pieds-noirs en général : « Je voulais dire aussi que les conditions de leur exil forcé furent honteuses, notamment au moment de leur retour en France. Ils ont été parqués, dépouillés, abandonnés, méprisés. Il a fallu pour l’immense majorité d’entre eux repartir à zéro, tout reconstruire. La situation qui fut réservée aux harkis fut encore plus scandaleuse. Il s’agit d’une véritable tache sur l’honneur de la République française. »
Il poursuit : « Je terminai mon propos en informant mon auditoire que nous avions eu une discussion très franche avec le président Bouteflika sur les visas. Je ne pouvais accepter qu’il soit reproché à la France de ne pas en accorder assez, alors même que cela représentait déjà un flux de six cent mille personnes par an. À l’inverse, l’Algérie refusait à quelques centaines de pieds-noirs de retourner sur la terre de leur origine et de leur enfance, ce qui provoquait une grande peine pour ces familles.
Enfin, Sarkozy regrette de ne pas pouvoir emmener dans sa délégation qui se rendait à Constantine le chanteur Enrico Macias, qui y avait pourtant toutes ses racines. « Je trouvais injuste cette pratique du deux poids deux mesures. »
A suivre…