L’Afrique australe frappée de plein fouet par la sécheresse
L’Afrique australe fait face actuellement à l’une des pires sécheresses qu’elle ait connue depuis des décennies, détruisant les récoltes et précipitant des pénuries d’eau et d’électricité dans un contexte de crise climatique croissante.
La grave sécheresse dans la région, exacerbée par le phénomène climatique El Niño, a conduit à une insécurité alimentaire extrême et à des pénuries d’eau pour environ 26 millions de personnes qui se trouvent désormais confrontées à des «niveaux de crise de faim aiguë».
De la Zambie au Malawi et à la ceinture céréalière de l’Afrique du Sud, El Niño sème le désordre et la misère dans une Afrique australe extrêmement vulnérable aux phénomènes météorologiques extrêmes. Dans la foulée, plusieurs pays de la région ont été contraints de déclarer l’état d’urgence et de catastrophe nationale en raison de la grave crise alimentaire. C’est notamment le cas de la Zambie, du Zimbabwe, de Madagascar, du Malawi, de l’Angola et du Mozambique.
Ces pays, qui sont en outre confrontés à d’importantes épidémies de choléra et à d’autres maladies d’origine hydrique, ont reçu moins de 20 % des précipitations attendues, avec des conséquences dévastatrices pour la population qui dépend en grande partie de l’agriculture pluviale.
«On estime que 45 % des superficies plantées en Zambie ont été détruites au moment même où la culture de maïs de base devrait arriver à maturité», a déclaré le Président zambien, Hakainde Hichilema. Plus de 90 % de l’agriculture du pays est réalisée par de petits agriculteurs de subsistance qui dépendent de la pluie. L’agriculture représente 19 % du produit intérieur brut et emploie 75 % de la population de la Zambie.
Au Zimbabwe, les débits d’eau du fleuve Zambèze qui alimente les turbines dont le pays dépend pour l’électricité, représentent moins d’un quart de ce qu’ils étaient il y a un an. Certains agriculteurs ont renoncé à cultiver et à récolter leurs récoltes, laissant le bétail brouter ce qui reste.
La situation en Namibie n’est guère meilleure, le pays ayant entamé l’abattage de milliers d’animaux sauvages, dont des hippopotames, des éléphants, des buffles ou des zèbres, pour nourrir les populations affamées par la pire sécheresse depuis des décennies.
L’Afrique du Sud, quant à elle, ne semble pas avoir été durement touchée par la sécheresse induite par El Niño, comme dans les autres pays de la région australe. En partie car la grande majorité de la production agricole, notamment du maïs, est récoltée par des agriculteurs commerciaux qui reposent sur la technologie GPS pour la plantation.
Dans ce contexte, le Programme alimentaire mondial (PAM) a lancé un appel pour une aide d’urgence de 300 millions de dollars, afin de pouvoir apporter le soutien nécessaires aux personnes les plus affectées. «Plus de 26 millions de personnes sont touchées par une insécurité alimentaire aiguë dans la région australe», a averti Antonella D’Aprile, directrice du Programme au Mozambique, lors d’une conférence de presse
L’Afrique australe appelée à renforcer sa résilience à la sécheresse
Compte tenu des effets dévastateurs de la sécheresse dans la région, des experts préconisent une meilleure préparation pour éviter les pénuries alimentaires au cours des prochaines années, arguant que le phénomène El Niño devrait se produire plus fréquemment à mesure que le climat continue de se réchauffer.
Des analystes de l’Institut des études de sécurité (ISS) de Pretoria estiment à ce propos que la résilience à la sécheresse devait être renforcée dans la région pour garantir que les agriculteurs et les systèmes agricoles soient plus résilients et adaptés aux sécheresses. «La vulnérabilité chronique à la sécheresse affecte de manière disproportionnée les populations rurales qui dépendent de l’agriculture et de l’élevage à petite échelle et pluviales, ainsi que les groupes marginalisés», notent-ils.
Un constat partagé par des scientifiques, réunis récemment à Johannesburg pour évaluer dans quelle mesure le phénomène El Niño, ainsi que le changement climatique induit par l’homme, ont modifié la probabilité et l’intensité des faibles précipitations. Ils ont, dans ce contexte, préconisé de renforcer les systèmes d’alerte précoce, les mesures d’anticipation et les efforts de réponse d’urgence, et ce par des engagements en faveur de systèmes de protection sociale réactifs aux crises.
Les scientifiques soulignent également que le maintien des systèmes de gouvernance foncière traditionnels avec une intégration appropriée dans les cadres modernes s’avère «crucial» pour la gestion durable des terres et la réduction de la vulnérabilité à la sécheresse en Afrique australe.