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Vidéo. A Paris, un opéra « africain » créé par l’ex-leader de Blur et le réalisateur de Timbuktu

Un opéra qui veut « chanter » les relations entre l’Afrique et l’Europe, aussi douloureuses soient-elles: « Le Vol du Boli » est le fruit de la rencontre entre l’un des plus célèbres réalisateurs africains, le Mauritanien Abderrahmane Sissako, et le touche-à-tout de la pop anglaise, Damon Albarn.

L’opéra, dont la première se tient mercredi au Châtelet à Paris, conte l’histoire des relations entre l’Afrique et l’Europe depuis le XIIIe siècle, à travers un fétiche, le boli. Dans la culture animiste bambara de l’Afrique subsaharienne, il s’agit de l’objet le plus sacré, considéré comme un protecteur et un guide.

Une grande partie des artistes sont Africains et les musiciens maliens, congolais et burkinabés sont accompagnés d’un choeur ancien (masculin) et d’un choeur féminin mené par la célèbre chanteuse malienne Fatoumata Diawara, qui a déjà collaboré avec le groupe Gorillaz et Abderrahmane Sissako dans son film « Timbuktu ».

Une oeuvre qui rappelle le spectacle musical « Bintou Wéré » (2007) présenté à Bamako puis au même Théâtre du Châtelet comme « le premier opéra africain », né de la collaboration d’artistes originaires des pays du Sahel.

 

En 2016, le Théâtre du Châtelet contacte le musicien anglais –chanteur des groupes Blur et Gorillaz– pour écrire un opéra du XXIe siècle. Pour son troisième spectacle musical, l’auteur-compositeur de 52 ans pense tout de suite à l’Afrique, après s’être inspiré de l’Asie pour « Monkey Journey to the West (2007) et de l’univers d' »Alice au pays des merveilles » pour « Wonder.land » en 2016.

Mais l’Anglais ne se sent pas « légitime » pour créer un opéra seul, qui plus est sur l’Afrique, explique-t-il à l’AFP. C’est alors que Abderrahmane Sissako, réalisateur notamment de « Timbuktu » (2014) –couronné de prix à travers le monde–, entre en scène.

Leur première rencontre a lieu au bord du fleuve Niger, au Mali, se souvient Damon Albarn. « Être ensemble à Bamako m’a permis de voir quelqu’un d’autre en Damon. Ce n’était plus le musicien, mais un homme heureux et généreux », déclare le réalisateur mauritanien, 58 ans, qui avoue qu’il connaissait à peine les chansons du Britannique avant de le rencontrer.

Pour l’écriture du livret, Abderrahmane Sissako et le réalisateur Charles Castella, amis de longue date, s’inspirent de l’histoire du vol du boli, narrée par Michel Leiris dans « L’Afrique fantôme », journal de bord qu’il a tenu pendant la célèbre mission ethnographique Dakar-Djibouti (1931-1933).

L’ethnologue avait été chargé de dérober un boli. L’objet volé, assemblage de matières organiques dont la forme peut évoquer un animal, est exposé au Musée du Quai Branly.

Dans son livre, « Michel Leiris se repent de ce vol mais le musée n’expose pas cette page du livre », indique Charles Castella. « Abderrahmane m’a dit +On va ouvrir à la bonne page+, et cela a été le point de départ », poursuit le co-auteur de l’opéra.

La question de la restitution des oeuvres d’art volées, offertes ou achetées –à bas prix– dans les pays qui étaient alors des colonies françaises anime depuis plusieurs années les milieux culturels notamment.

Mais « Le Vol du Boli » ne se veut pas une « tribune politique », déclare le réalisateur mauritanien. « C’est une conversation ». Damon Albarn espère lui que cet opéra donne « de la matière à penser ». « On plante une petite graine, et c’est le début du changement », ajoute-t-il.

« L’Art ne doit pas s’exprimer violemment. Si tu as mal quelque part, c’est beaucoup plus émouvant de chanter le mal que de le crier », abonde Abderrahmane Sissako.

Damon Albarn a écrit la musique, Abderrahmane Sissako et Charles Castella le livret, mais le processus de création s’est appuyé sur des ateliers auxquels ont participé depuis 2018 musiciens, comédiens et danseurs, entre le Mali, la France et l’Angleterre.

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