Mali : L’ONU affirme qu’une frappe française a tué des civils, Paris réfute toute bavure
Une enquête des Nations unies conclut qu’une frappe aérienne conduite par l’armée française au Mali en janvier a tué 19 civils réunis pour un mariage, et non pas seulement des djihadistes, comme l’a soutenu la France jusqu’alors. Paris réfute toute bavure et émet des « réserves ».
Le ministère français des Armées « maintient avec constance et réaffirme avec force » que « le 3 janvier, les forces armées françaises ont effectué une frappe aérienne ciblant un groupe armé terroriste identifié comme tel » près de Bounti, souligne-t-il. Il « émet de nombreuses réserves quant à la méthodologie retenue » et « ne peut considérer que ce rapport apporte une quelconque preuve contredisant les faits tels que décrits par les forces armées françaises ».
Le 3 janvier 2020, une vingtaine d’habitants ont été tués par une frappe aérienne lors d’un mariage dans le village de Bounti. Selon des villageois et une association peule, il s’agissait d’une manœuvre de l’armée française. Les autorités françaises et maliennes avaient alors affirmé que les avions de chasse français avaient visé et éliminé des dizaines de djihadistes et qu’il n’y avait ni mariage, ni femmes, ni enfants. L’ONG Human Rights Watch (HRW) avait réclamé une enquête « rapide et impartiale ».
Réparation pour les familles
Au terme de cette enquête, appuyée par la police scientifique des Nations unies, la Minusma « est en mesure de confirmer la tenue d’une célébration de mariage qui a rassemblé sur le lieu de la frappe une centaine de civils parmi lesquels se trouvaient cinq personnes armées, membres présumés de la Katiba Serma », assure le résumé du rapport, consulté par l’AFP.
La Katiba Serma est affiliée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, ou JNIM en arabe), alliance djihadiste elle-même affiliée à Al-Qaïda. Au moins 22 personnes ont été tuées, dont trois des membres présumés de la Katiba Serma – 19 sur le coup, 3 au cours de leur évacuation, affirme le document.
Le groupe touché « était très majoritairement composé de civils qui sont des personnes protégées contre les attaques au regard du droit international humanitaire », a ajouté la Minusma. L’agence de l’ONU « recommande » aux autorités maliennes et françaises de diligenter « une enquête indépendante, crédible et transparente ».
Elle préconise d’examiner les processus préalables aux frappes, voire de les modifier. Elle recommande aussi aux Français et aux Maliens de chercher à établir les responsabilités et d’octroyer le cas échéant une réparation aux victimes et à leurs proches.