Sarah Boukri: «La migration profite plus à l’Europe qu’à l’Afrique»
Sarah Boukri, Docteur en sciences politiques, directrice partenariat et relations internationales au sein de l’association marocaine pour le développement en Afrique, répond à nos questions dans le cadre de la deuxième édition des Panafricaines. Rencontre.
Le forum traite des questions de migrations. Quel est votre regard sur la question ?
La migration a toujours existé. L’humanité s’est faite à travers la migration. Des continents ont été peuplés grâce à la migration. Sans la migration, certains continents seraient restés déserts. Aujourd’hui, le problème se pose parce qu’il y a eu un pic migratoire en 2015, due à la crise en Syrie.
On a vu de nombreux réfugiés syriens arriver aux portes de l’Europe, et puis le pic s’est arrêté. Maintenant, on exagère le problème de la migration.
Je ne sais pas pour quelle raison, mais je suppose que c’est pour des raisons politiques et que ça concerne principalement l’Europe, car c’est elle qui parle de migration, ce ne sont pas nous les Africains, car nous sommes très ouverts à l’échange, donc, à la migration.
Pour ma part, l’Afrique doit aller vers un partenariat effectif et d’égale à égale avec l’Europe sur la question. L’Afrique n’est pas, et ne sera jamais le gendarme de l’Europe sur cette question. C’est un problème qui concerne surtout l’Europe et c’est à l’Europe de trouver une solution, un partenariat avec les pays directement concernés.
Pourquoi parlez-vous de régler un problème politique interne ?
Je parle de régler un problème de politique interne parce qu’en Europe, il y a la montée du populisme. Un mouvement contre le phénomène migratoire pour des raisons que je ne juge pas toujours logique. La chancelière allemande, Angela Merkel, avait fait le pas d’accueillir les migrants, parce que la population allemande est vieillissante, ainsi que beaucoup de pays d’Europe.
Et la solution la plus rapide à ce problème de vieillissement de la population, c’est de repeupler l’Europe avec des migrants c’està-dire des jeunes africains. Vue sous cet angle, la migration profite plus à l’Europe qu’à l’Afrique.
Revenons sur cette deuxième édition des Panafricaines. Quelle appréciation faites-vous de l’initiative ?
Toute initiative qui amène des personnes de différents pays, de différentes cultures à se rassembler, à parler d’une même voix, à échanger d’une façon saine, sereine, réfléchie et détendue, je félicite. Je pense surtout que c’est de ce genre de forum dont on a besoin pour sortir de ces foras habituels, où tout est cadré et surveillé. J’ai assisté à des interventions qui m’ont vraiment marqué, parce que c’était spontané et très naturel. C’est de ça dont on a besoin. En plus, les journalistes sont des gens du terrain, qui savent ce se passe dans la réalité. On a besoin de cette vision de terrain, cette vision réelle. Je dirais que c’est une excellente initiative.
Source: magazine Femmes d’Afrique