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Décryptage. Mali. Assimi Goita, l’homme des Américains ?

Le colonel Assimi Goita, qui a émergé jeudi dernier à la tête de la junte au pouvoir au Mali, a travaillé pendant des années avec les forces d’opérations spéciales américaines dans des opérations de lutte contre le terrorisme en Afrique de l’Ouest. Selon le Washington Post, sa proximité avec les Américains ne fait aucun doute. 

 

Homme d’action, rigoureux et discret, le colonel Assimi Goita devient une figure publique le jour du coup d’Etat. Enveloppé dans la tenue kaki des forces spéciales de l’armée malienne, Goita annonce dans la télévision nationale :  « Je me présente : je suis le colonel Assimi Goita, le président du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) ».

 

Les Maliens qui ont salué le coup d’Etat par des scènes de liesse dans les rues, découvrent que le tombeur d’Ibrahim Boubacar Keïta, qui a été appréhendé dans la foulée. Rapidement, la machine diplomatique s’emballe. La CEDEAO et la France ouvrent des canaux de négociation pour sonder les intentions de la junte qui a pris le pouvoir, et convoquent une réunion d’urgence au Conseil de sécurité de l’ONU.

 

 

A Paris et dans les capitales de l’Afrique de l’Ouest c’est la stupéfaction. En cause, aucun service de renseignement n’a pu anticiper cette prise du pouvoir par les militaires malgré les milliers de soldats français en présence dans la région.

Pour dissiper les doutes des chancelleries étrangères au Mali, l’émissaire américain pour le Sahel, Peter Pham déclare sur Twitter : « Nous suivons avec inquiétude l’évolution de la situation aujourd’hui au #Mali. Les #USA s’opposent à tout changement extra-constitutionnel de gouvernement, que ce soit par ceux qui sont dans la rue ou par les forces de défense et de sécurité ».

 

Goita, un proche des Américains ?

 

Pour connaitre les relations entre Goita et le Pentagone, il faut remonter dans le temps.  En effet, le nouvel homme fort de Bamako commandait le Bataillon autonome des forces spéciales maliennes basées à Gao dans le centre du pays, avant d’être propulsé au-devant de la scène à la faveur du coup d’Etat.

 

Ce haut cadre qui dirigeait les troupes de choc de lutte contre le terrorisme qui a plongé le pays dans le marasme, dispose d’un CV très fourni.

 

Formé au Prytanée militaire de Kati, prestigieuse école d’où sont sortis les meilleurs éléments de l’armée malienne. Il est également diplômé de l’Ecole interarmes de Koulikoro, située à une cinquantaine de kilomètres de Bamako. Il a participé à des stages en France, en Allemagne et en Egypte dans le cadre d’entraînement des forces spéciales.

 

Mieux, il s’est entretenu régulièrement avec les troupes américaines et a assisté à des exercices d’entraînement dirigés par les États-Unis, ont déclaré des officiers des deux pays au Washington Post.

 

Goita se serait rapproché des Américains lors d’une formation d’élite au sein du programme Spirit of America de la CIA américaine. Le colonel Goïta et son unité travaillent régulièrement avec les forces américaines, en particulier dans le cadre des exercices « Flintlock », et a assisté à un séminaire bilatéral de l’Université des opérations spéciales conjointes à la base aérienne de MacDill en Floride, selon le ministère de la Défense, rapporte le Washington Post.

 

 

Pour se défaire des soupçons qui pèsent désormais sur les Etats-Unis, le lieutenant-colonel Anton T. Semelroth, un porte-parole du Pentagone, déclare au quotidien américain : « L’acte de mutinerie au Mali est fermement condamné et incompatible avec la formation et l’éducation militaires américaines. L’armée malienne ne recevra plus de soutien des États-Unis jusqu’à nouvel ordre. »

 

Quand l’histoire bégaye

 

La nouvelle situation malienne n’est pas sans rappeler le coup d’Etat de 2012 qui avait propulsé le capitaine malien Amadou Haya Sanogo, devenu chef de la junte. Ce militaire professeur d’anglais avait également participé à plusieurs programmes de formation aux États-Unis, entre autres à la base des Marines de Quantico.

A l’époque, le tombeur du président Amadou Toumani Touré est également un produit du Prytanée militaire de Kati. La crise institutionnelle qui sera induite par ce coupe d’Etat avait permis au Mouvement de libération nationale de l’Azawad (MNLA), touareg, de proclamer l’indépendance du Nord, avant de s’en faire chasser par une coalition de groupes djihadistes, plongeant le pays dans le chaos, et poussant le Mali à demander officielle des français.

 

La France lance alors l’opération Serval en janvier 2013 qui sera remplacée, le 1er août 2014, par la célèbre opération Barkhane pour contenir les différents groupes terroristes qui sévissent dans la région.

 

En plus des troupes françaises, des soldats du G5 du Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), sont soutenus par des forces européennes et du renseignement de l’armée américaine.

 

 

C’est à cette époque, que le colonel Assimi Goita participe aux premières opérations contre les djihadistes. Selon un récit non confirmé, il aurait été fait prisonnier en 2012 à Tinzawatene, dans le nord du Mali, par la rébellion touarègue, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), avant d’être libéré grâce à l’imam Dicko, une des figures des manifestations organisées par le Mouvement du 5 juin, qui a précipité le coup d’Etat (sic!).

 

 

Pour le moment, la France semble passer la main à la CEDEAO qui poursuit sa négociation avec la junte malienne. Reste à savoir si le président Ibrahim Boubacar Keïta est encore une carte valable ou sera-t-il sacrifié sur l’hôtel d’une nouvelle répartition des cartes géopolitiques de la région. Il est également légitime de penser à l’avenir de l’opération Barkhane au cas où les intérêts américains s’opposent à ceux de la France. Affaire à suivre…

 

 

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